Ajouté le 26 oct. 2016
Le printemps s’est rapproché
De l’été
Il avait craint le pire, le gel,
De s’enneiger
Il avait su être patient,
Temporiser
Jamais emmitouflé
Rarement entristé
Le printemps s’est rapproché
De chez nous
La souffrance oubliée des arbres gelés
Le redoux
De l’automne virant au gris
Il reste l’aventurier insoumis.
Le printemps s’est rapproché
Un matin
En tous points semblables, sans surprise
Le malin !
Pile à l’heure sans raison
Mais avec exactitude
Le printemps s’est rapproché de toutes les solitudes.
***
Le voyageur de Nice
Est celui qui sait revenir
Contaminé par le germe du partir
Un journal sous le bras pour se contenir
Une valise absente pour advenir
Le nez au vent pour subvenir.
Le voyageur de Nice
Marche d’un pas de géant
Les idées bleues en vagues
Sentimental en volonté
Destinataire d’un froid qu’il sait dompter
Méditerranée ancrée en un cœur solide.
Le voyageur de Nice
Ne baisse jamais le rythme
Qu’importe que septembre fusionne avec l’automne
Du temps, il connaît tous les secrets.
***
UN MIROIR SUR LA CHEMINEE
Un miroir sur la cheminée
Une brume jaune sur l’horizon bleuté
Les regards s’envolent vers l’Ouest
Le fusain craie comme on crie vent d’Est
Ici commence le périple, l’odyssée
Des dimanches pluvieux sous le ciel, des nuées
Un matin sans contrainte, sans galère, matin de rêve
Pour dessiner, ravi, le cours libre du temps, ses trêves
Un salon d’enfance en hiver
Transi mais feutré
Où l’on se vit en imagination
Débridée
Où le bois crépite de mille éclats dorés
Un miroir sur la cheminée.
***
LES BALNEAIRES
La veille de notre arrivée
Au pays de la mer abandonnée
Bienheureux estivants aux pieds palmés
Valises encombrées et filets de pêches raccommodés.
Souvent pendant ces étés à Saint-Cast
En dehors des images de sables et des piqûres d’aoûtas
Tranquilles balnéaires dans le gentil fatras
Que nous laissions à Dame Maëlle, au caractère ; oh là !
Je ne dépeindrai pas les chambres de l’hôtel
D’antan, dantesques, aux destinataires éternels,
Une discipline de major pour nous les pimprenelles
Qui maîtrisions le breton et de la Bretagne, son ciel
La veille de notre arrivée
Elle avait à craindre, la marée
Les filles de Paris allaient débarquer
C’était peur sur la plage de Saint-Calais.
***
Le temps de l’épilogue
D’une fin qui progresse sans dialogue
Juste retour au calme, une sentence
De l’enfant à l’adulte, du germe à la semence.
Le temps de l’épilogue
Bâtit un pont entre almanach et catalogue
Erige une tour entre abime et conscience
Quand l’attitude polie étreint toute science.
Le temps de l’épilogue
C’est maintenant parler en monologue
Simple photographie d’un vieillard qui se défile
Quand lâche la dernière couture du tout dernier fil.
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LIVRES
La liste des livres sur le carnet orangé
Livres lus, livres à lire, livres en sommeil
En position oubliée dans la grande malle d’activité
Jeu de bibliothèques sous les années qui veillent.
La liste des livres de quatrième
Quand le jour de la rentrée avait sonné
Sentir les retrouvailles, les pages que l’on sème
Quand la cloche des rendez-vous appelait.
La liste des livres qui demeurent
Apparence d’apprentissage ou réalité connue
Dans la mémoire jamais ne meurent
Les croquis, les cartes, les paragraphes contenus.
***
En novembre, je vis
Venir lentement à ma rencontre
Dans le temps de la pluie
Un rêve gris, une ombre
Que j’aimais sans savoir
Quoi ou qui,
Envie d’un temps crucial
Joyeux pour ou contre.
Voir d’avance disparaître le paysage
En lumière douce ou sombre
Un souvenir d’étain surgir
Et changer le temps en secret.
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Je suis heureuse que vous aimiez Le Rouge et le Noir
Les images de l’Italie, les splendeurs, les miroirs,
Tout un passé dressé, terrible revenant
A des milliers de kilomètres, et d’années, un Julien, éconduit, renversant.
Je suis heureuse que vous aimiez Stendhal
Dans toute page, il sublime, dit le bien, soumet le mal
Au jugement des cœurs des hommes, de l’âme des femmes, loin du banal
Un livre à lire en chambre, fenêtre ouverte, sur le canal.
Je suis heureuse que vous aimiez les livres
Pas ceux de la rentrée, d’arbres meurtriers, papier ivre
Mais ceux que l’on glane sous la poussière
Et qu’on lit dans la cabane des bois, voyageur solitaire.
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Que représente le nombre 26 ?
Une drôle de question qui vaut dix !
Dans toute la région, la réponse se faufile, elle s’immisce,
Dans les conversations, du café, des Myosotis.
Que représente le nombre 26 ?
La question a été taguée sur les murs, chez Alice,
Près du sanctuaire des Alyscamps, le parc de Vincent, ses iris,
Et de la nudité des rocailles, de la crudité des couleurs, sous les canisses.
Que représente le nombre 26 ?
Les marches célestes de la cathédrale de Nice ?
Le code d’un pèlerinage en pays d’Osiris
Quand l’orme et ses essences entraînent vers le Styx, vers Isis ?
Que représente le nombre 26 ?
Juste une invitation à la soirée de Candice
L’itinéraire en quittant la nationale empruntez la D26,
Pour rejoindre la direction, de la fête à l’hotel Ibis !
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Il faut que j’écrive sur le champ
Champ nourricier, cultivé, toujours à moissonner,
Champ du créateur, perpétuel ensemencé
Toute lassitude éloigner
Disparaître tout remords,
Amonceler.
Fragments de vivre
En douleurs incarnés
Soirées de monde à refaire
Bonheurs réguliers
Combats d’opinion assouvis
Luttes d’idées permises
Mots consignés
Demain en ici
Les heures missionnées
Quel mystère emprunté à cet acte : vivre ?
Quel sens accorder à cet état : vivant ?
Quand s’écoule du sablier le temps mouvant
Il faut que j’écrive sur le champ.
Muriel Cayet - Poésie Au Présent- 2016